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Chapitre 10 : 1994 - 2004

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« Fluctuat Nec Mergitur »

Vous le savez peut-être, votre humble narrateur est devenu parisien et il l’aime la devise de sa ville, encore plus lorsqu’elle vient illustrer parfaitement cette année 1994. Roger a certes été battu par les flots, mais n’a pas sombré, oh que non. Père et fils n’ont jamais été aussi solidaires et puisqu’une clause de non-concurrence les empêche de pratiquer leur travail de gros, c’est par le noble métier de caviste que l’aventure redémarra, les dés sont lancés. Roger fait confiance une fois de plus à son instinct, il repère très vite des anciens locaux d’assurance qui sont disponibles, à seulement 150 mètres des anciennes Caves du Chatelet, dans le quartier du « Marché Couvert » à Annemasse. Les locaux sont dans leur jus, dans un quartier sans commerce, il y a tout à faire, et ça tombe plutôt bien, ce n’est pas l’énergie qui manque. Mais l’énergie ne fait pas tout, Rénald ne pourra relever ce défi tout seul, il lui faut un bras droit.  Quelques mois avant son licenciement, Roger avait été charmé par un jeune mec qui travaillait alors chez Leclerc. Casting aussi improbable que le redémarrage de cette aventure. La probabilité pour qu’un inconnu, issu de la grande distribution devienne un jour le complice d’une nouvelle aventure avec Rénald, qu’il ne se connaissait alors pas, est quasiment nulle. Mais parfois la vie est bien faite. Le courant était déjà passé avec Roger, c’était au tour de Rénald de faire la connaissance de celui qui allait alors accompagner cette aventure sur la totalité de cette décade, le bien nommé Nico.

« Je resterai chez vous 10 ans » se souvient Roger à l’évocation de l’arrivée de Nico

Avec Rénald & Nico, la passion parle sans retenue et les efforts pour mener à l’ouverture de ce commerce s’en retrouvent décuplés. Le soir du Beaujolais Nouveau, le 16 novembre 1994, après 6 mois de travaux d’aménagement placés sous la direction de l'architecte Jean Michel Lepage, l’histoire redémarre officiellement. La fête est grandiose avec plus de 300 invités, Laure, Valérie et toutes leurs amies sont au service, la générosité est au rendez-vous, la mairie d’Annemasse offre la location du lieu, Paule David (et son orchestre) la prestation musicale et Boujon, le fromage : c’est un moment fort en émotion. Plus tard, dans la soirée, on voit revenir Roger et Rénald qui avaient disparu depuis une heure, 3 verres à la main et une bouteille de « Cuvée du fondateur », ils étaient partis au cimetière de Bons en Chablais pour partager ce moment de joie immense avec René.

Les résultats du 1er exercice surprennent tout le monde, l’activité a démarré sur les chapeaux de roue, et les vins du Languedoc, fraichement rentrés en cave, n’y sont pas étrangers. Après avoir séduit Roger, Rénald & Nico, c’est toute la clientèle du magasin qui tombe en amour pour cette région viticole jusqu’à présent boudée par les buveurs d’étiquettes.  L’intérêt grandissant de la clientèle annemassienne pour le renouveau de ce terroir accélère le développement du magasin, la charge de travail s’en retrouve naturellement augmentée et les apports ponctuels et gracieux de Laure, Valérie et Françoise, femme, sœur et mère de Rénald, permettent à Rénald et Nico de gérer le développement de l’affaire.

Les années passent, le magasin se développe, s’étoffe chaque année un peu plus. L’achat des murs de cette ancienne assurance offrait un espace trop grand pour une activité naissante, qu’à cela ne tienne, Roger va solliciter son ami Boujon, fromager habitué des marchés, du côté de Thonon, qui cherchait à se sédentariser. Si l’un pose ses valises, l’autre fait les siennes, Roger commence à prendre ses distances, installé à présent à Kerbourg, du côté de Guérande. Les années s’enchainent et les résultats sont à la hauteur de l’investissement que cette aventure exige. La dynamique entre le fromager et le caviste fonctionne à merveille, les clients de l’un deviennent presque automatiquement les clients de l’autre et petit à petit, cette zone auparavant non commerçante, devient un lieu de régalade prisé de la clientèle non seulement annemassienne mais bientôt genevoise aussi. L’aspect évènementiel commence à poindre le bout de son nez, et si l’inauguration de 94 avait été fantastique, c’est à présent le Salon des vins du Languedoc qui s’impose tout naturellement en 1999. C’est la salle Matin Luther King, à proximité de la gare d’Annemasse, qui sera le théâtre de cette manifestation qui scellera définitivement l’amitié très forte qui lie les Vins Duvernay aux vignerons languedociens. Rencontré quelques années plus tôt, par l’entremise d’Annie Crouzet, au CFA de Groisy, Jean-Philippe Granier avait immédiatement tapé dans l’œil de Roger, un jour de dégustation au sein de l’établissement de formation hôtelière. Roger avait déjà un a priori positif sur cette région qu’il arpentait, 35 ans auparavant, au volant de son camion-citerne, pour en rapporter des jus alors que sa femme était enceinte de Rénald. L’enfant avait bien grandi à présent, et c’était à son tour de faire découvrir cette région en manque de notoriété. Il faut dire que lorsque votre guide n’est autre que le directeur technique du Syndicat des vins du Languedoc, votre Salon ne peut que bien s’annoncer et ce ne sera que le début de nombreux Salons des vins qui suivront. Merci encore à toi Jean-Philippe, un grand monsieur.

 

 « Le 1er janvier, on démarre à fond et le 2 on accélère, et c’est toute l’année comme ça ! » Jacky Barthelme (Domaine Albert Mann – Jura)  

Nouveau millénaire, nouveaux locaux, alors que les murs commençaient à devenir trop petits pour abriter l’activité, le commerçant voisin propose la vente d’une partie de son magasin, une opportunité providentielle qui va donner un nouveau souffle aux Vins Duvernay qui bénéficient à présent  d’une partie stockage, d’une cave de vieillissement, d’une pièce dédiée à la dégustation, et d’un bureau de compta qui permet à Florence, arrivée en 1998, d’enfin pouvoir elle aussi, poser ses valises après maints déménagements. Dotés d’un nouvel outil de travail, beaucoup plus fonctionnel, c’est le moment de passer la démultipliée, suivant ainsi la devise de Jacky Barthelme. Démarrage des premiers diners-dégustation sous la direction de grands chefs de cuisine, se prêtant volontiers à l’exercice de leur art au sous-sol du magasin autour de jolies dégustations. Plusieurs amis du vin viendront proposer un développement sous la forme d’une franchise que les Vins Duvernay développeront petit à petit à Rumilly, puis à Sallanches, à Cluses et à Annecy. Nico, part sur d’autres aventures avec le sentiment d’avoir participé à l’éclosion et l’évolution d’une belle affaire. Cette décade s’est passée à vive allure, et s’il n’est nul temps de souffler, ni de regarder le chemin parcouru, il est néanmoins bien temps de renforcer les rangs avec l’arrivée de Benoit et bientôt d’un associé pour mieux réfléchir à la gestion et au développement des activités de détail et de gros, mais ça, ce sera dans le prochain épisode.